In memoriam... Philip K. Dick

Il est toujours délicat d’affirmer que l’œuvre d’un auteur contemporain restera « éternelle ». D’autant plus qu’une telle affirmation ne sera réellement vérifiable qu’après un minimum d’années écoulées.

 

Ceci est encore plus frappant lorsqu’il s’agit d’un auteur de SF (Science-fiction).

La technologie avance (c’est sciemment que je n’utilise pas « progresse ») à si grands pas, que la plupart des « nouveautés techniques » présentées dans des ouvrages datant de plus de cinq ans, paraissent souvent totalement obsolètes ; le récit dans son ensemble apparaît désuet, « daté » et perd beaucoup de son intérêt.

 

Il est pourtant quelques auteurs qui, dans ce domaine, auront fait exception en marquant à jamais la littérature du genre.

Philip K. Dick (K pour Kindred) est l’un d’eux (que l’on retrouve aux côtés d’un Issac Asimov, ou d’un Jules Verne, autres génies de la SF, probablement plus connus du grand public). Né à la fin des années 1920, période où le progrès est en effervescence, Dick décède jeune, à 54 ans. L’année 2022 marque par conséquent le 40ème anniversaire de sa disparition. Une disparition toutefois purement physique puisqu’il reste un des écrivains phares de la littérature SF passée, présente… et à venir !

 

Cet auteur a fait montre d’une clairvoyance époustouflante en matière de développement des technologies, et en particulier dans celui de la robotique et de l’I.A. (Intelligence artificielle). Aujourd’hui encore, tous les spécialistes des nouvelles technologies ont forcément lu tout ou partie de son œuvre. Mais ce qui fait le formidable succès de ses ouvrages, c’est la capacité de Philip K. Dick à non seulement prévoir les nouvelles sciences qui envahissent notre quotidien, mais aussi anticiper la façon dont notre monde évolue au contact de ces technologies, d’un point de vue social, écologique, humain. (Clifford D Simak est un autre exemple d’auteur de cette veine, avec en particulier son étonnant récit : Demain les chiens).

 

La lecture d’un roman de Philip K. Dick n’est pas seulement un bon moyen de se distraire et en apprendre davantage sur les sciences modernes (ce qui est déjà beaucoup). Ses ouvrages ont le don d’attiser notre curiosité et, surtout, de nous contraindre à réfléchir.

C’est une des raisons pour laquelle le cinéma s’est largement emparé de ses récits (et pourrait même le faire davantage), pour produire des films comme Blade Runner (*), dont le premier volet est apparu sur les écrans en… 1982 ! Précisément l’année où Philip K. Dick nous a quittés.

(*) Le film Minority report est une autre référence de réussite cinématographique appartenant à la SF, tirée de l’œuvre visionnaire de Dick.

 

À lire et à relire :

UBIK                                                                                 (1969)    Éditions 10/18

Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? (1968)    Poche

Le Maître du Haut-château   (Prix Hugo)                   (1962)    Poche

Publié le 22/08/2022
Impensable, inimaginable, insupportable

Sans doute est-il ringard de ne pas aimer la chasse, la tauromachie et, d’une manière générale, tout ce qui va à l’encontre du respect des animaux et de leur bien-être.

Alors… j’assume de passer pour un ringard.

 

Je me demande pourtant s’il est tout aussi ringard de refuser de payer des impôts qui servent et encouragent ces activités. N’est-il pas choquant, en effet, d’apprendre dans le Journal Officiel que les dotations accordées aux chasseurs sous la seule ère Macron ont augmenté de… 23 000% !?

Oui, vous avez bien lu : 23 000% ! Une paille !

 

En 2017, les subsides versés par l’État à la Fédération des chasseurs présidée par Willy Schraen étaient de 27 000€. On pouvait certes regretter que cet argent ne soit pas versé à des associations travaillant à des activités sociales plus essentielles, cependant le montant pouvait passer pour "raisonnable". Mais voilà que le très « Officiel » Journal, nous apprend que, pendant les cinq années Macron, ces dotations ont augmenté pour atteindre en 2021 le montant de : 6,3 millions d’€ !!!

 

6,3 millions d’€ détournés de nos impôts ; qui ne financent pas les hôpitaux ni aucun service public ; qui passent sous le nez des établissements d’éducation ; qui ne subventionnent pas de logement pour les sans abris… Près d’un million de repas auraient pu être distribués aux personnes indigentes. Mais non, cette somme colossale est offerte à des individus qui tuent pour leur seul plaisir (et certainement pas parce qu’ils ont faim) et qui ont les moyens de se payer des équipements extrêmement coûteux.

 

Seulement voilà, le très sympathique (!?) Willy Schraen connaît les bonnes vieilles ficelles, et n’a pas hésité à clamer à qui voulait l’entendre : « Je voterai Emmanuel Macron dès le premier tour ».

 

D’évidence, Macron sait renvoyer l’ascenseur.

Un ascenseur de 6,3 millions d’€. Et, comme si cela ne suffisait pas, ce même Macron a fait diminuer le prix du permis de chasse par 2 ! (200€ au lieu 400€). Il a aussi autorisé l’utilisation de silencieux sur les armes de chasse ! Les « bavures » deviennent ainsi indétectables et les responsables impunis. Et il a maintenu l'autorisation de chasser des espèces menacées, en totale contradiction avec la législation européenne. Pas de soucis : les amendes, ce sont les contribuables français qui les payent.

 

Plus qu’une honte, c’est une infamie, doublée d’une trahison. Détourner ainsi les impôts des Français pour de simples visées électoralistes ; favoriser (en douce) une activité que la majorité d’entre nous réprouve ; soutenir une catégorie majoritairement aisée à l’encontre des plus démunis…

Nous savions ce Président totalement incompétent en matière d’écologie, indifférent aux questions environnementales, mais qui aurait pu imaginer qu’il irait si loin ?

 

Je reprendrai ici une citation du Mahatma Gandhi, qui concluait un de mes précédents carnets de voyage :

 

« LA GRANDEUR D’UNE NATION ET SON DEGRE DE MORALITE SE MESURENT A LA FACON DONT ELLE TRAITE LES ANIMAUX ».

Publié le 20/08/2022
« Lettre Imaginaire » n°12 : Hommage à Prévert

Il est une région de France que je regrette d’avoir découvert si tard dans mon existence : le Cotentin.

De larges parts de ce territoire sont demeurées sauvages et le climat n’y est pas toujours facile. Cela a sans doute contribué à le préserver, jusque-là, du tourisme de masse. Il m’est parfois arrivé de le comparer avec la Tasmanie, pour ces mêmes caractéristiques, et la beauté de ses côtes. Des routes étroites, déjà presque anglaises, sinuent de troupeaux de vaches en petits villages, réservant de belles surprises à ceux qui s’y aventurent. Ainsi, Omonville-la-Petite, près du cap de la Hague, où se trouve la maison dans laquelle Jacques Prévert a vécu, depuis son acquisition, en 1970, et jusqu’à sa mort, en 1977. Le grand poète et écrivain est d’ailleurs enterré au pied de l’église du village avec sa femme et sa fille.

Cette maison lui correspond si bien. Pleine de charme, de poésie, de modestie. Le jardin, très fleuri, est resté en bonne partie sauvage, comme en butte à certaines « conventions ». Et l’intérieur, généreux, fait de bois, d’escaliers, de petites pièces et de nombreuses fenêtres, est une invitation chaleureuse au repos et à la douceur de vivre.

C’est bien évidemment à son intention que j’ai écrit le poème qui paraît dans cette nouvelle Lettre imaginaire.

(Note : Pierrot, signataire de la lettre, ignorait d’évidence l’existence de la maison d’Omonville-la-Petite).

 

 

 

L'élève Hamlet : Être ou ne pas être dans les nuages ?

Tous les oiseaux font de leur mieux : ils donnent l'exemple.

J. Prévert

 

Monsieur Prévert,

 

Je n’ai jamais eu la chance de vous rencontrer. Et pourtant ! Je crois bien avoir lu toute votre œuvre, et pas qu’une fois.

Je n’avais que neuf ans lorsque l’on m’a offert, c’est étonnant, un de vos ouvrages :« Paroles ». Je dis étonnant car, aux enfants de cet âge, on offre plus volontiers un jouet ou, s’il s’agit de lecture, un livre de contes. Et ne pensez pas que ce sont mes brillants résultats à l’école qui m’ont valu cette marque d’attention inattendue. Mon travail scolaire était tout sauf brillant. J’avais certes l’avantage d’avoir développé le goût de lire, mais sans que cet exercice apparaisse le moins du monde extraordinaire.

Et c’est justement votre recueil qui a tout changé !

Je l’affirme : ma vie en a été bouleversée. Vos Paroles ont libéré la mienne. Sans doute me suis-je d’emblée reconnu dans votre « cancre » qui efface chiffres et mots, dates et noms pour dessiner le visage du bonheur. Jusque-là, amateur de romans d’aventure et de bandes dessinées, je me désintéressais de la poésie. Un art littéraire que je croyais hors de toute réalité, hors du vivant, sans doute trop artificiel. Pourtant, grâce à votre plume, j’ai ri, pleuré, aimé, imaginé, rêvé.

 

Je crois savoir que vous vivez à Paris. Ce qui ne vous empêche pas d’évoquer des baleines et des ratons laveurs, la mer et les astres, des chevaux et des paons. Vous parlez aussi des gens, jeunes ou vieux, ceux de la rue de Seine, ou d’Alicante. Moi, je vis à la campagne, un petit hameau au pied d’une montagne, dont je ne me suis jamais éloigné. Aussi, je me demandais si, pour écrire vos textes, vous aviez été au-delà de Paris. Connaissez-vous l’Inde, les Amériques, les pyramides d’Égypte ? J’aimerais tant découvrir le monde ; lire, écrire des poèmes, et visiter plein de pays. Mais je n’ai que douze ans. Pour voyager, je me réfugie dans la lecture et l’écriture.

Tout près de chez moi, s’écoule une large et belle rivière. J’ai souvent rêvé de m’abandonner à son courant, me laisser porter par ses eaux claires avec l’espoir qu’elle me conduise jusque chez vous, à Paris. Hier, jour de beau soleil, j’étais assis sur sa berge, guettant un bateau ou un martin-pêcheur. C’est là que j’ai décidé de vous écrire. Ne connaissant pas votre adresse, j’ai glissé mon texte dans une bouteille, laissée à la dérive. Qui sait, peut-être vous parviendra-t-il ?

Il s’intitule « Gange » :

 

J'aime la couleur étrange

qu'ont les plumes d'ange

qui descendent les eaux du Gange

 

Sont-elles tombées, graciles

dénudant le dos docile

do si la ré, des anges gardiens du Nil

 

Ou sont-elles la tendre aumône

des anges à tous les hommes

des bords du Rhône aux rives du Fleuve Jaune

 

À moins qu'ce soit le trou, le trou d'ozone

qui tue nos anges, pauv’ petits mômes

quand tout brûle autour de l'Amazone

 

Restent les plumes et l'encre de chine

Les parchemins que les facteurs acheminent

Porteurs de l’espoir qui guide les âmes enfantines.

 

Monsieur Prévert, je vous aime.

Pierrot

 

 

La publication des Lettres imaginaires va marquer une pause. Le temps de profiter de l’été et ses journées ensoleillées, et de voir venir pour la suite…

Publié le 10/07/2022
Ambiance « Chaud-brûlant » pour l’Australie

La rigueur particulièrement marquée de cet hiver en Australie ne doit pas nous induire en erreur.

L’évolution du climat se mesure sur de plus longues périodes. Et cette mesure présage hélas de nouveaux et dramatiques incendies pour les années à venir.

En effet, en moins d’un demi-siècle (40 ans, et donc bien peu de choses à l’échelle de l’histoire de notre planète), la saison des feux en Australie s’est prolongée d’un mois ! Elle passe de 100 jours en 1979 à 130 jours en 2019. Quant à la durée de météo incendiaire maximum, elle y a augmenté de 56% dans le même temps.

 

Juste de quoi prolonger la « barbie season » pour ceux qui pensent que « It’s playing for sheep stations ».  

(Révisons notre australien populaire : « Ceux qui veulent dédramatiser se réjouiront que la saison des barbecues soit rallongée d’autant »).

Publié le 04/07/2022
« Lettre Imaginaire » n°11 : Parce que tu crois au Père Noël ?

 

« Mot valise »

AMÉRICHRISTMAS

Continent considéré comme un modèle de réussite économique et démocratique

par toutes les personnes qui croient au Père Noël.

A. Créhange

 

 

Père Noël,

 

J’ai treize ans, nous sommes début décembre, et je vous écris.

Au moins, je sais que ma lettre sera lue. Je n’ai même pas besoin d’y coller un timbre : La Poste s’engage à vous porter mon courrier, du moment que votre nom figure sur l’enveloppe. Aussi, je garde un réel espoir qu’elle honorera sa promesse en délivrant ma lettre… au vrai Père Noël ! Elle dispose de tous les moyens en ce sens. Moi, pas.

Je vous rassure, je ne suis pas complétement idiot ni attardé. J’ai bien précisé : le « vrai » Père Noël. Autrement dit : vous… monsieur J. B. ! Et si je ne connais pas votre adresse, je sais tout de même qu’elle se situe quelque part aux États-Unis, que vous dirigez une gigantesque multinationale dont le nom commence par « A » et… que vous êtes l’homme le plus riche du monde !

Je joins une note plus précise pour la personne de La Poste qui ouvrira ce pli. Je veux m’assurer qu’elle ait toutes les informations pour retrouver votre adresse. Un simple mot en retour de sa part, comme elle le fait pour chaque courrier reçu, me confirmant qu’elle vous l’a bien transmis, sera mon premier cadeau de Noël.

Mon deuxième cadeau (je vous promets que je n’en demande pas plus), sera votre propre réponse ; la certitude que vous avez lu mon message.

Vous ne me connaissez pas. Je m’appelle Maho et je vis en Bretagne, dans le canton de Gourin. Mes parents tiennent une librairie, ma grande sœur va au lycée et moi au collège. J’ai de très bonnes notes et j’ai hâte d’aller au lycée moi aussi. Pour l’instant, je trouve que l’école c’est trop facile. J’aime lire tout ce qui me passe entre les mains : des magazines, des mangas, des BDs (j’ai constitué une super collection qui fait le bonheur de mes copains), des romans, des revues scientifiques… Je fais également partie de la Ligue de Protection des Oiseaux du Morbihan et du Club d’échecs local. Si vous avez des questions sur moi, n’hésitez pas : je vous répondrai avec plaisir.

Je dois aussi vous dire que je fais partie de ces enfants qui se sont sentis très déprimés en apprenant que le Père Noël n’existe pas ! Ce n’était pas tant pour ma relation avec lui, qui se bornait à une lettre par an, mais pour le mensonge que révélait cette imposture. Un mensonge dont mes parents s’étaient faits les complices. Certes, ils n’étaient pas seuls. Ce mythe, je l’ai compris par la suite, est le fruit d’un gigantesque réseau d’affabulateurs. Mais que mes parents en fassent partie…

Nous en avons beaucoup parlé, le soir du jour où j’ai découvert la supercherie. J’étais en colère. Mais j’ai vu leur embarras, leur désir de bien faire, le piège dans lequel ils étaient tombés en refusant que leur fils soit « le seul garçon de son âge à ne pas croire au Père Noël ». Et puis, ça n’avait posé aucun problème avec ma grande sœur. Elle avait vite admis le fait, du moment qu’elle continuerait à recevoir ses cadeaux. Je pense même qu’elle a su plus vite que moi voir l’avantage qu’elle allait en tirer. Il est en effet beaucoup plus facile désormais de passer sa commande en direct, et de surfer sur les différents sites avec Maman ou Papa pour s’assurer de faire le bon choix.

Alors, ma colère s’est éteinte. J’ai même eu le sentiment de sortir grandi du passage de cette épreuve ; d’entrer dans le monde de l’adolescence. À mon tour, j’allais pouvoir lever les yeux au ciel et hausser les épaules chaque fois qu’un gamin ou une gamine rêverait à voix haute du Père Noël.

 

C’est alors que j’ai découvert votre existence. C’est vous, monsieur J. B. qui avez pris la place du Père Noël ! Vous vous êtes inspiré de ses méthodes ; vous avez recruté votre propre armée de lutins ; vous surfez sur l’univers du cadeau ; vous êtes le seul à pouvoir accomplir le miracle de délivrer des millions d’objets, en quelques heures seulement, à travers le monde entier.

Certes, vous ne passez pas par les cheminées (aussi : quelle idée saugrenue !). Il ne sert à rien non plus de laisser sur la table de la cuisine un verre de lait et des biscuits pour vos rênes. Vous les avez remplacés depuis longtemps, eux et leur traîneau carillonnant, par une flotte d’avions et de camions qui sillonnent la planète en tous sens et à toute heure. Le costume de celui qui porte le présent tant attendu jusqu’à notre porte n’est pas rouge écarlate ni doté d’une capuche ; il ressemble à tous les uniformes de livreurs. Mais vos stocks sont eux aussi illimités. On peut tout trouver chez vous, et aucune vitrine d’aucun magasin ne pourra jamais concurrencer votre site internet !

C’est une évidence pour moi : J. B. a détrôné et remplacé P. N.

Ce faisant, vous en avez profité pour redonner un sacré coup de jeune au personnage : finie la longue barbe frisée dont on se demandait quelle surprise elle pouvait encore cacher. Terminées les mèches bouclées d’un blanc étincelant et les petites lunettes rondes à monture métallique, apanages du vieillard sans doute perclus de rhumatismes. Au placard le célèbre costume, un tantinet ridicule, à la couleur hésitant entre le rubis et le grenat, la fraise écrasée et la cerise. Adieu la silhouette ventripotente de gros balourd. Votre style à vous est celui du cadre de moins de soixante ans, svelte et dynamique, au visage glabre (ne cachant aucune surprise) et au crâne résolument chauve. Vos costumes sont aussi variés en formes qu’en couleurs, portés avec ou sans cravate, parfois un nœud papillon (ce qu’aucun P.N., à ma connaissance, ne se serait autorisé).

Avec vous, Noël est un temps fermement inscrit dans le futur. La technologie a supplanté le rêve et la magie ; le désir secrètement conçu et mûri toute une année s’est muté en une succession d’envies dont on peut changer comme on veut, selon les « super bonnes affaires à ne surtout pas rater ». D’autant que votre société garantit les meilleurs prix, livraison comprise jusque « dans les souliers sous le sapin » (moyennant tout de même un petit extra).

Tout pourrait donc être formidable, et pourtant j’ai un souci. C’est la raison pour laquelle je vous écris et que je garde espoir de recevoir vos conseils en retour.

 

Initialement, je veux dire avant de préférer cet échange en direct avec vous, j’avais choisi comme cadeau (pour le Noël à venir) un roman de science-fiction qui n’est hélas plus publié et que l’on ne peut acquérir que d’occasion. Je l’ai vite trouvé sur le site de A., votre société, et à un prix très correct, « Livraison garantie avant le 20 décembre ». Je n’ai évidemment pas oublié que mes parents sont libraires. Malheureusement, ils n’avaient aucun moyen de se procurer ce livre. Aussi ai-je été tenté de leur suggérer une commande sur A…

Mais je n’ai pas osé.

Peut-être auraient-ils accepté, juste pour me faire plaisir, mais je sais que je leur aurais fait de la peine. Ils parlent de plus en souvent de leurs difficultés et je les sens moins heureux qu’avant. Ils ont du mal à maintenir leur commerce à flot. En fait, ils fulminent contre la concurrence impitoyable que vous leur opposez. Ils enragent si l’on prononce le nom de votre plate-forme en leur présence. Ils en sont à imaginer de devoir mettre la clé sous la porte. Du coup, je comprends leur tristesse : c’est le rêve de toute leur vie qui se briserait !

Je crois que le problème, c’est qu’ils ne seront jamais aussi bons commerçants que vous. Ils aiment trop les livres ! C’est vrai qu’ils prennent parfois du temps pour conseiller leurs clients. Ils rédigent des fiches de lecture (ils m’ont même demandé d’en écrire, pour le rayon jeunesse) et il arrive que leurs commandes tardent à arriver, vu qu’ils n’ont pas tous les ouvrages en stock.

Il me semble que votre modèle est plus adapté au monde d’aujourd’hui. Et puis, votre entreprise est devenue si importante que c’est maintenant au monde de s’y adapter ! Car il est vrai que plus personne n’a le temps de rien. C’est si rapide de surfer sur votre plate-forme, trouver l’objet de nos rêves ou changer d’avis grâce aux publicités que vous affichez sur toutes les pages. La commande se passe en deux minutes et il est souvent possible d’être livré à domicile en 24 heures. Question efficacité, impossible à battre !

Seulement, j’ai lu plusieurs articles et reportages à ce sujet. J’ai cru comprendre que si tout le monde commandait chez vous, plein de commerces comme celui de mes parents fermeraient pour de bon. Alors, qu’est-ce que je dois faire ? J’ai l’impression d’être pris entre deux mondes.

Tout cela a même transformé Noël.

Dans les « vieux » livres, on en parle comme d’une féerie, un moment de partage et de bonheur animé par des chants d’enfants et de joyeux lutins qui se démènent pour que la fête soit la plus réussie possible. Aujourd’hui, on dirait que les gens dépriment à l’approche de Noël. Une fête triste, qui se résume à la distribution de cadeaux (avec toutefois un « Super avantage à ne pas rater » : la garantie que si l’un d’eux ne plaît pas, ce n’est pas grave, puisqu’il pourra être revendu dès le lendemain).

Nous sommes très loin de la magie évoquée dans les contes de Dickens ou d’Andersen, même quand ils sont un peu tristes eux aussi, mais pour d’autres raisons.

 

Quand j’ai renoncé à demander à mes parents de commander mon livre sur votre site, je me suis surpris à imaginer, sans doute pour me consoler, qu’un matin de 25 décembre, sans que je m’y attende, je trouverai au pied du sapin, entouré de traces de suie, un petit paquet, enveloppé et enrubanné à l’ancienne, avec un joli papier aux couleurs chatoyantes découpé plus ou moins droit. Je l’ouvrirai et découvrirai mon cadeau. Il lui aura fallu des années pour me parvenir, et il n’en sera que plus précieux à mon cœur.

Alors, tout ne serait-il qu’une question de course contre le temps ? Et comme « le temps c’est de l’argent », il est possible d’en gagner beaucoup. Est-ce parce que vous avez compris cela que vous avez créé votre société et qu’elle réussit si bien dans le monde entier ?

Mais… si en réalité le temps n’existait pas ? qu’il n’était qu’une illusion ? (comme je l’ai lu dans plein de revues scientifiques récemment). Ne faudrait-il pas dès lors tout réinventer ? Si la plupart des adultes qui ont, toute leur vie durant, donné foi à l’idée d’un passé, d’un présent et d’un futur, apprenaient qu’il ne s’agit que d’une vue de l’esprit, pourquoi refuseraient-ils… de croire au Père-Noël ?

 

J’espère sincèrement ne pas vous ennuyer avec mes questions, monsieur J. B., et si vous me répondez, j’en serai d’autant plus touché, car je sais comme le temps vous est si précieux.

Je vous souhaite un joyeux Noël.

Avec mes cordiales salutations,

 

Maho

Publié le 04/07/2022
Whisky à gogo

 

Il est décidément des histoires dont il serait tentant de faire un roman.

 

Quoi de plus « romantique », en effet (exception faite du climat) qu’une petit île perdue dans l’Arctique, entre l'île d'Ellesmere et le Groenland ? Un gros morceau de rocher, désertique et tranquille… jusqu’à ce que la géopolitique s’en mêle.

 

C’est l’histoire de l’île de Hans que nous raconte le magazine Géo cette semaine. Elle concerne le Canada et le Danemark qui, depuis tout de même 1973, se disputent ledit rocher dont l’appartenance leur est garantie à tous deux par le droit international. Cela ne posait guère de problèmes jusqu’à ce que, en 1984, des Canadiens aillent y planter leur drapeau national, au pied duquel ils enterrent une bouteille de whisky… canadien ! Vexés, les Danois ont tôt fait de remplacer drapeau et whisky par leurs équivalents danois.

Et voilà l’affaire lancée ! Celle-ci, heureusement, prend davantage l’allure d’une joute bon enfant que d’une véritable guerre diplomatique. Même si, pendant un demi-siècle, Canadiens et Danois ont continué d’enterrer et déterrer du whisky sur l’île de Hans et d’y déchirer des drapeaux nationaux !

Il faut attendre 2018 pour qu’une réflexion commune soit lancée sur le sujet afin d’y mettre un terme. L’idée retenue, in fine, est que l’île sera divisée en deux !

 

Ce que toutefois l’article de Géo ne révèle pas, c’est ce que sont devenus tous ces flacons de (bon ?) whisky ? Si l’on fait le calcul, cela représente tout de même une centaine de bouteilles !

De là à imaginer un astucieux trafic de contrebande, il n’y aurait qu’un pas.

Gageons plutôt que le verre de l’amitié sera « généreux » lorsque l’accord entre les deux pays sera scellé.  

Publié le 29/06/2022
« Lettre Imaginaire » n°10 : ne pas oublier Nellie Bly

Pardon pour ce léger retard à publier une nouvelle Lettre imaginaire. Mais la voici tout de même, et d'autres suivront au fil des mois à venir.

 

 

Je ne poursuis pas mon chemin, c’est mon chemin qui me poursuit.

J. Verne

 

L'énergie bien appliquée et dirigée permet de tout accomplir.

N. Bly

 

 

Cher Monsieur Jules Verne,

 

Je m’appelle Emily et je vous écris pour mon frère, Tom. C’est l’un de vos plus fervents admirateurs. Il connaît tous vos livres par cœur.

Le soir, lorsque l’on va se coucher, il me demande toujours de lui lire un passage d’un de vos romans. Il le choisit au hasard, et son jeu favori c’est de réciter à haute voix la fin du chapitre, sans que j’aie besoin de lui souffler. Il ne se trompe presque jamais. Et quand ça arrive, je sais que c’est à cause de sa maladie.

Tom est très souffrant. C’est pour cela qu’il reste à la maison. Une maladie au nom compliqué : L e u c o d y s t r o p h i e. Maman m’a dit que c’est une maladie rare et « orpheline ». Je n’ai pas très bien compris pourquoi, vu que Papa et Maman sont bien vivants.

Tom est souvent fatigué. Il n’entend pas bien et sa vue n’est pas bonne non plus. C’est pour cela qu’il aime que je lui fasse la lecture.

Jusque récemment, il n’avait que quelques-uns de vos livres, dont ses trois préférés : Le tour du monde en 80 jours, L’île mystérieuse et 20 000 lieues sous les mers. Du coup, il nous parle constamment de Phileas Fogg, de Cyrus Smith et du Capitaine Nemo. Ce sont ses trois héros. Il y a deux ans, la veille de l'anniversaire de Tom, Papa a apporté deux grands cartons à la maison. Dedans, il y avait toute la collection de vos ouvrages. Même Tom ne savait pas que vous en aviez écrit autant. Il a fallu que Papa lui construise une étagère supplémentaire, au-dessus de son lit. Vos livres sont tous alignés là.

 

Je crois que ce que mon frère apprécie le plus avec vos récits, c’est qu’ils l’emmènent partout sur la planète, et jusque dans l’espace ou sous les océans. Il aurait « 20 000 » questions à vous poser, et voudrait savoir si vous avez beaucoup voyagé. Quel bonheur ce serait pour lui de vous rencontrer, même juste une heure !

J’aimerais bien aussi. Il faut dire qu’à cause de Tom, j’en connais un rayon sur vos aventures. Mais, pour être sincère avec vous, et si je dois imaginer que vous veniez un jour chez nous, ou nous chez vous, il y a quelqu’un d’autre avec qui j’aimerais énormément parler. Vous la connaissez, vous avez même écrit un message à son intention, dans les journaux, après ses exploits :

 

« Jamais douté du succès de Nellie Bly,

son intrépidité le laissait prévoir.

Hourra ! Pour elle et pour le directeur du World !

Hourra ! Hourra ! »

 

Autour de moi, et même à l’école, tout le monde vous connaît, mais personne ne connaît Nellie. C’est grâce à un article dans une revue que j’ai appris qui elle était et ce qu’elle avait fait. Et aussi que vous vous étiez rencontrés, chez vous, à Amiens. Il faut dire que je passe mon temps à collectionner toutes les informations et les images qui vous concernent, pour Tom.

Je trouve que c’est injuste qu’on l’ait oubliée si vite, sauf peut-être en Amérique. J’espère que cela ne vous vexera pas, mais elle a quand même fait aussi bien, et même mieux que Phileas Fogg : le tour du monde toute seule, en exactement 72 jours, 6 heures, 11 minutes et 14 secondes ! Battant tous les records connus, y compris celui de M. Fogg. Et puis, surtout, M. Fogg n’a jamais existé, enfin je crois. Alors que Nellie, elle, est une vraie personne.

J’ai tant d’admiration pour elle. Elle est mon héroïne. J’ai l’impression que Tom l’aime bien aussi. Au moins, il ne lui en veut pas d’avoir battu « son » Phileas.

Elle a eu le courage d’entreprendre ce voyage (40 070 km), en partant de chez elle, en Amérique. Southampton, Calais, Amiens (pour vous rencontrer), Brindisi, Suez, Aden, Colombo, Singapour, Hong-kong, Yokohama, San Francisco, New-York… tant d’endroits incroyables, qui nous font rêver, Tom et moi, et dont je ne sais même pas si j’en visiterai un seul dans ma vie !

En plus de cela, c’était une femme engagée, une reporter incroyable qui, d’après l’article que j’ai lu, était un « as de l’immersion ». Elle se déguisait et changeait de nom pour espionner dans des usines ou dans des asiles, afin de dénoncer la façon dont on y traitait les gens, et en particulier les femmes. Il paraît qu’elle a même joué le rôle d’une dresseuse d’éléphants !

Il y a plusieurs photos d’elle avec l’article que j’ai découpé. Elle est tellement belle ! Des livres racontant ses aventures sont parus en Amérique. Bien sûr, ils sont écrits en anglais. Cette semaine, j’ai demandé à ma professeure de documentation si elle savait s’il existe des livres sur Nellie en français. Elle ne connaissait même pas son nom ! Bon, on ne peut pas tout savoir non plus. Comme c’est son métier, elle m’a promis de faire des recherches pour moi.

 

Plus tard, mon métier à moi, ce sera Reporter d’investigation ! Tom, lui, jure que s’il guérit, il sera Savant-aventurier, comme vos héros.

En attendant, je suis sûre que vous êtes quelqu’un de très gentil. Alors, de la part de mon frère et de moi, je me permets de vous embrasser.

 

Emily

 

Publié le 26/06/2022
« Lettre Imaginaire » n°9 au service Courrier des lecteurs du « Vingtième siècle »

C’est inouï !...  C’est prodigieux !.. C’est incroyable !...

Dire que dans quelques minutes,

ou bien nous marcherons sur le sol de la Lune,

ou bien nous serons tous morts.

C’est merveilleux !

(Hergé)

 

Monsieur Tintin (et Milou),

 

Je ne connais pas l’adresse à laquelle vous contacter, ni celle de la famille de Monsieur Hergé. Quant au château de Moulinsart, du Capitaine Haddock, il semble qu’il soit devenu la « Société Moulinsart ». J’ai également découvert vos aventures dans le journal Le Vingtième Siècle. C’est donc à ces deux adresses que je vous écris.

De toute façon, mon espoir est de vous rencontrer, alors que vous êtes un personnage de bande dessinée. Je sais que cela peut paraître idiot. Seulement, c’est l’idée de Paul, un camarade de classe qui croit encore au Père Noël. J’ai bien essayé de l’en dissuader, mais il ne veut pas me croire, moi, qui existe pourtant bien. Enfin… il me semble. (Parfois, j’ai un peu du mal à savoir où commence et où finit la réalité. Et puis, il y a tellement de choses que personne ne sait expliquer.)

Alors voilà, si Paul avait raison, je serais bien bête de ne pas essayer. C’est pour cela que j’ai accepté d’écrire « à la personne que je souhaiterais le plus voir pour de vrai passer un peu de temps avec moi » (c’est le projet de mon copain Paul). Et pour moi, cette personne, c’est vous !

J’ai bien sûr lu toutes vos aventures, du premier au dernier album. Mon préféré est « Le lotus bleu ». Peut-être parce que je suis d’origine chinoise. Même mes parents, qui ne lisent pas de bande dessinée, mais qui eux sont nés en Chine, m’ont dit qu’ils avaient aimé le lire. Ils ont admiré la calligraphie de M. Hergé, et ils disent qu’il connaît bien l’histoire de leur pays.

 

Mais j’aime aussi « Le secret de la Licorne ». Chaque fois que j’en lis un passage avant de me coucher, je suis sûr de faire un rêve agréable ou rigolo. L’avantage aussi, c’est qu’il y a une suite : « Le trésor de Rackham le Rouge ». Du coup, cette histoire-là dure plus longtemps.

Alors voilà, je ne pense pas que je pourrai un jour vous parler, mais si c’était le cas, j’aurais plein de questions à vous poser.

- Quel âge avez-vous ? Je serais incapable de le dire. Je ne sais même pas si vous êtes encore un enfant ou un adulte ? Pourtant, vous êtes reporter, donc vous travaillez. Mais vous ne ressemblez pas du tout aux autres adultes. D’ailleurs, tant mieux. En plus, vous ne vieillissez jamais. Ce doit être pratique. Je pense que c’est pour ça que vous avez beaucoup de temps pour tous vos voyages et vos aventures. Vous avez dû faire au moins dix fois le tour du monde !

- On dirait que vous ne voulez pas vous marier ? Est-ce à cause de vos enquêtes ? J’imagine qu’elles prennent tout votre temps, et que vous voulez rester libre d’aller où bon vous semble. Aussi, les rares fois où vous rencontrez des femmes, elles ne sont pas très jolies. Je pense par exemple à Mme Castafiore. Alors je me dis qu’en fait c’est M. Hergé qui n’aime pas trop avoir des filles dans ses histoires. J’ai un autre camarade, Tom, qui est fan des romans de Jules Verne (j’aime bien aussi, mais ils sont moins drôles). Du coup, lui et sa jeune sœur collectionnent tout sur Jules Verne et ses héros. Tom m’a montré un article dans lequel Jules Verne explique que s’il ne met jamais de personnages féminins dans ses livres, c’est parce qu’ils parleraient tout le temps et qu’alors les autres ne pourraient plus rien dire ! Peut-être que M. Hergé a pensé la même chose ?

- Dans vos histoires, il y a toujours des méchants, mais ils ne sont pas très nombreux. Les autres gens sont plutôt gentils et tranquilles. Aujourd’hui, on dirait qu’il y a surtout des méchants ! Plein de gens qui trichent, volent les autres, se battent… On ne voit plus que ça à la télé ou dans les journaux. Je me demande si vous sauriez quoi faire pour les arrêter et qu’ils aillent en prison, comme les bandits dans vos histoires.

- J’aime énormément Milou. Mes parents ne veulent pas que j’aie un chien. Ils disent qu’à Paris il ne serait pas heureux. Mais si un jour j’en ai un, je l’appellerai Milou. Ou Baixue. C’est son nom en chinois. Cela veut dire neige, à cause de ses poils blancs tout frisés. Où l’avez-vous trouvé ? Est-ce qu’il était abandonné ? Mais surtout, il est drôlement bien dressé. Le nombre de trucs incroyables qu’il arrive à faire ! Il est formidable. S’il vous plaît, faites-lui plein de caresses de ma part.

- Il y a aussi le Capitaine Haddock. Il est trop drôle ! Il ne fait que des bêtises, mais il est très courageux. En tout cas, je l’aime beaucoup. L’ennui, c’est qu’il boit plein de wouhisky. Avec toutes les bouteilles qu’il vide, il va forcément finir par tomber malade, et peut-être mourir. Il était encore vivant dans votre dernière aventure. Mais je ne peux m’empêcher de penser pour après… Ce serait bien qu’il puisse perdre cette habitude. Maman dit qu’il vaut mieux boire du thé, parce que c’est bon pour la santé. Peut-être devriez-vous en parler à votre ami le capitaine ?

 

J’ai encore plein de questions, mais je préfère les garder… au cas où. D’ailleurs, si vous acceptez mon invitation, elle vaut aussi pour Milou, le Capitaine Haddock et le professeur Tournesol.

Ce jour-là, d’après Paul, nous serons plusieurs camarades, et nos parents nous aideront à tout préparer pour bien vous recevoir.

Et puis, si Paul a tort et que vous ne pouvez pas venir, je ne vous en voudrai pas. Je continuerai de lire et relire vos albums, même quand j’aurai plus de soixante-dix-sept ans !

 

Franck

 

Eh oui, Jules Verne est aussi un de ces Êtres extraordinaires que nombre d’enfants auraient aimé rencontrer « pour de vrai ». Voyons ce que Tom, et surtout sa jeune sœur Emily, qui l’admirent tellement, en diront avec la prochaine "Lettre imaginaire" (dans 3 semaines).

Publié le 05/06/2022

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