France Australie : de l'eau dans le... gaz ?

« C’est face à l’adversité que l’on reconnaît ses véritables amis ».

Voilà qui explique sans doute qu’à la veille de possibles conflits de grande ampleur, se vérifient les véritables alliances et surgissent les trahisons, les manquements aux engagements pris, aux paroles données.

La France en fait l’amère expérience avec la rupture de son « contrat du siècle » avec l’Australie. Un contrat qui remonte pourtant à 2016, il y a 5 ans ! et qui porte tout de même sur plus de 60 milliards de dollars, pour 12 sous-marins dont la construction a été confiée au chantier naval de Cherbourg.

 

Le « prétexte » avancé par Scott Morrison, 1er Ministre australien : les sous-marins français seront d’une technologie dépassée puisqu’à propulsion conventionnelle. Ce dont l’Australie a besoin pour assurer sa sécurité, c’est de sous-marins nucléaires !

 

Étonnante et tardive prise de conscience.

Surprenante aisance à rompre la parole donnée (et quelles que soient les conséquences pour la France).

Décision bien préparée, puisque déjà l’Australie confirme une nouvelle commande de sous-marins, mais cette fois aux USA ; des sous-marins à propulsion nucléaire !

 

Depuis cette annonce, on peut observer comme les chroniqueurs s’y perdent, avec le peu d’informations dont ils disposent. Car un sous-marin à propulsion nucléaire, ne signifie pas nécessairement un sous-marin "lanceur de missiles nucléaires" ! Même si une propulsion nucléaire est sans doute plus « avancée » que celle initialement prévue, l’argument d’une capacité de défense nettement accrue pour la marine australienne paraît du coup inapproprié. Et puis, pourquoi ne pas avoir consulté la France ?

Pourquoi ne pas s'être référé à l’Émeraude, un des sous-marins nucléaires d’attaque français que notre pays a justement placé début 2021 dans la zone pacifique, et qui participe au déploiement de forces navales piloté par les USA ?

 

On peut imaginer le dépit de nos dirigeants.

Non seulement pour le terrible camouflet qui vient de leur être infligé, la perte importante d’un tel contrat dans un contexte économique déjà difficile, et aussi pour avoir placé leur confiance dans le nouveau gouvernement Biden et ses belles promesses d’ouverture envers l’Europe.

L’orchestration d’une telle trahison, juste après les événements afghans (et sans remonter jusqu'à Bush et Chirac avec l'Irak), a de quoi laisser perplexe.

 

Alors, quelle est la réalité diplomatique et surtout géostratégique derrière tout cela ?

Cette rupture de contrat n’est ni plus ni moins que la confirmation du mépris que l’Angleterre et les USA portent envers notre pays et l’Europe.

Pour Biden et Johnson, l’heure est à la menace chinoise et aux moyens de la contenir. D’évidence, cela passe par un renfort des alliances entre, d’abord, les quatre pays anglo-saxons (USA, GB, Australie, Canada), puis, dans un deuxième temps, et avec beaucoup de méfiance, tous les pays qui trouveront intérêt à se placer du côté anglais plutôt que chinois, option jusque-là prise par la France, à l’instar du Japon, de l’Inde, de la Corée du Sud et de beaucoup d’autres.

Les USA n’en finissent plus de créer des « cercles d’influence » géostratégiques pour se préparer à affronter la Chine, à la fois dans une guerre commerciale, mais peut-être bientôt militaire.

Après les Five Eyes, alliance entre USA, UK, Canada, Australie, et N.Z., il y a eu récemment la création du Quad (USA, Japon, Inde et Australie) et, annoncé officiellement mercredi dernier : AUKUS, un nouveau pacte signé entre USA, Australie et UK. Un partenariat historique de sécurité pour défendre leurs intérêts dans la zone indopacifique, et partager des technologies avancées.

C’est à travers AUKUS que se sont négociés la vente des sous-marins US à l’Australie (et le rejet de la France), ainsi que l’achat de missiles américains Tomahawk par l’Australie.

 

Vous l’aurez donc compris, le véritable responsable de cette montée en tension dans la zone pacifique (contradiction dans les termes ?:) serait… la Chine !

D’ailleurs, Morrison ne cesse de reprendre à son compte la « communication » américaine à ce sujet, en s’inquiétant notamment de la montée en puissance de la marine chinoise dans la région. Elle y dispose de plus de 350 navires de combat (dont 6 sous-marins nucléaires lanceurs d’engins porteurs de missiles nucléaires, et 40 sous-marins d’attaque), et prévoit une augmentation de 50% de sa flotte d’ici 2030.

Si cela n’est pas la preuve d’une stratégie guerrière de la Chine, que faut-il de plus ?

 

Les USA disposent, eux, d’une flotte de surface et de 21 sous-marins d’attaque et huit lanceurs de missiles nucléaires basés dans le Pacifique, pour la plupart basés à Pearl Harbor.

Que les Chinois tentent de se libérer de l’hégémonie navale qu’imposent autour de ses côtes les États-Unis depuis la Seconde guerre mondiale ne semble pas un argument recevable pour les alliés de Biden. Il est clair que, pour assurer ses ambitions en matière de commerce international, Pékin ne peut seulement compter sur ses Nouvelles routes de la soie, par voie terrestre, et doit pouvoir se garantir une libre circulation sur tous les océans et dans tous les ports. Une « liberté » que ni Biden ni Johnson ne sont prêts à lui accorder.

Les USA sont au contraire décidés à renforcer leur présence militaire, plus seulement au Japon, mais aussi en Australie. À leurs bases autour de Darwin (et en "juste retour" des sous-marins et des missiles commandés), devraient bientôt s’ajouter de nouveaux sites permettant le déploiement de forces navales et aériennes.

 

Les réactions françaises à cette nouvelle donne sont évidemment très attendues et seront observées et détaillées à l’international.

 

Il peut être intéressant de noter au passage que d’autres sont en désaccord avec Morrison, à commencer dans son propre pays. Le parti des Verts australiens (Greens) s’oppose à lui avec fermeté. Il considère que ces sous-marins US seront surtout des« Tchernobyl » flottants, mettant à la fois en danger la population australienne, mais augmentant d’encore un cran les tensions face à la Chine au risque d’une guerre froide, dangereuse et improductive, voire d’un possible conflit nucléaire. Plutôt que l’escalade aux armements, pourquoi ne pas agir en faveur d’un désamorçage du conflit ?

 

À noter aussi la position de la Nouvelle-Zélande (pourtant membre des Five Eyes), à travers sa remarquable Première ministre, Mme Ardern. Celle-ci confirme l’interdiction de ses eaux à tout sous-marin (à propulsion) nucléaire. Cela vaut aussi pour l’Australie et les USA dont les bâtiments militaires sont interdits depuis plus de 30 ans dans les ports néo-zélandais !

 

Les options de Scott Morrison ont le mérite d’être tout aussi claires. Il privilégie une position conflictuelle à l’égard de la Chine, en accord avec ses (seuls ?) alliés USA et GB, de la même façon qu’à l’heure de la lutte contre le réchauffement politique, il préfère ne prendre aucun engagement, sinon (comme tout récemment) donner son accord pour l’extension de nouvelles mines de charbon.

Voilà au moins un homme qui sait ne pas se tromper de guerre. 

Publié le 17/09/2021
Quand évoquer le délit d’ingérence et quand le réfuter ?

Ceux qui ont lu L’émeraude sacrée de Schwedagon, auront compris mon attachement pour ce beau pays qu’est la Birmanie.

 

Lors de précédentes rubriques, j’ai évoqué le drame épouvantable auquel sa population est soumise depuis le coup d’état des Généraux de février dernier. En sept mois, rien n’a changé. Sinon que plus d’un millier de Birmans ont été tués, et six fois plus incarcérés avant d’être, pour certains, condamnés à la peine capitale.

La « Dame de Rangoon », Aung San Suu Kyi, plusieurs personnes de son entourage et de l’ancien gouvernement, sont de nouveau soumises à des procès iniques. Dans le reste du pays, la situation alimentaire et sanitaire (Covid) est gravissime. Seuls s’enrichissent la caste au pouvoir et ses alliés, y compris ceux de l’étranger, qu’il s’agisse de multinationales ou de pays comme la Chine et la Russie, tous très concernés par les trésors que recèle le sous-sol birman.

 

Que fait la communauté internationale ? Rien. Tel Ponce Pilate, elle s’en lave les mains. Trop préoccupée par ses propres problèmes, elle a chargé l’ASEAN de gérer la crise birmane ; l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est, créée en 1967, selon les directives des États-Unis… alors en train de s’enliser dans la guerre du Vietnam !

Les pays membres de l’ASEAN (Philippines, Malaisie, Singapour, Thaïlande, Indonésie, rejoints plus tard par le Vietnam, le Sultanat de Brunei, le Laos et le Cambodge) sont majoritairement favorables… aux Généraux ! À l’instar de la Chine, ils sont davantage motivés à soutenir la croissance économique dans le sud asiatique, que par la question du respect des droits des Birmans. Dans ce pays il est aisé de prédire que la guerre civile va perdurer et alimenter derechef les flux migratoires qui gonflent inexorablement, et dans la pire violence, partout sur la planète.

 

Dans le même temps, au Brésil, et tandis que la démocratie est venue à bout de D. Trump aux États-Unis, la folie d’un Jair Bolsonaro, ex capitaine dans l’armée, au pouvoir depuis janvier 2019, provoque des drames dont l’humanité aura bien du mal à se remettre.

Que la communauté internationale ne se préoccupe pas plus du meurtre collectif réservé aux tribus autochtones, au prétexte, sans doute, qu’elles ne représentent qu’un très faible pourcentage de la population, est déjà difficile à accepter. Ces peuples indigènes ne semblent nous intéresser que lorsqu’ils excitent notre goût pour un certain « exotisme ». Mais ne méritent-ils pas notre considération sincère, et surtout notre protection contre un déséquilibré au pouvoir sans limites (Bolsonaro entend même « démissionner » le juge de la Cour suprême, un des rares étant encore en mesure de freiner ses décisions) ?

Nos pays, désormais inquiets du réchauffement climatique, devraient au moins s’intéresser d’un peu plus près à ce « président-empereur » brésilien, lorsqu’il s’en prend aux forêts d’Amazonie, le premier poumon de notre planète. Bolsonaro sacrifie des peuples porteurs de cultures endémiques millénaires, détruit leurs territoires (jusqu’ici à peu près protégés), ainsi que les multiples et riches écosystèmes brésiliens, au profit des orpailleurs, des sociétés minières, des puissants groupes agro-alimentaires… Ne s’agit-il pas d’une atteinte directe à notre patrimoine mondial ? Si Bolsonaro est incompétent à protéger ce patrimoine et, pire, qu’il le met lui-même en danger, la communauté internationale ne devrait-elle pas lui faire obstacle ?

 

N’apprenons-nous rien de l’histoire de notre monde, ou sommes-nous à ce point pétris d’hypocrisie ? Chaque fois que la communauté internationale préfère fermer les yeux lorsqu’elle est placée face à des génocides, des crimes contre l’humanité, au non-respect des engagements pris par des nations à l’égard des autres… elle n’a eu qu’à s’en mordre les doigts un temps plus tard.

La liste des pays et de leurs populations victimes de cette complicité coupable ne cesse de s’allonger, que ce soit en Afrique, en Asie, au Moyen-Orient, ou en Amérique du Sud.

 

Nous devons admettre que l’actualité s’ingénie à nous pousser à la réflexion, à mieux lire l’histoire de notre humanité pour enfin en tirer les leçons et ne pas reproduire sans cesse les mêmes erreurs, les mêmes crimes. Elle nous force à nous poser cette question : qui peut trancher entre « droit » et « délit » d’ingérence, en particulier lorsque la diplomatie mondiale devient sourde et aveugle ?

 

On ne peut, par exemple, avoir la même lecture des positions attentistes au début des deux premiers conflits mondiaux (14-18 et 39-45). Dans un cas, la résistance de Jaurès et des Pacifistes, dans l’autre l’écoute respectueuse et craintive face à la montée du nazisme.

Que faut-il penser de l’incroyable et persistante négation de l’holocauste ? De l’abandon à leur sort des peuples tibétain, arménien, ougandais, et tant d’autres encore ?

Pourquoi tant de passivité complice ? L’argument de la crainte d’une accusation d’ingérence ne tient pas. Il ne s’est en tout cas pas posé en d’autres situations (Vietnam, Irak…).

Comment expliquer notre complaisance à l’égard d’un Kadhafi, ou, plus actuel, envers les Qataris auxquels on déroule des tapis rouges en « oubliant » qu’ils financent des mouvements terroristes (y compris en Afghanistan) ?

 

Alors, l’ingérence devrait-elle être admise, encouragée ?

Si l’on en croit les vingt années de présence américaine en Afghanistan et le résultat obtenu, ou la position précaire des forces françaises au Mali, toujours pour contrecarrer la montée de l’islamisme… la réflexion s’impose.

 

C’est donc qu’il doit y avoir plusieurs formes possibles d’ingérence. Certaines plus souhaitables et plus efficaces que d’autres. Et en tout cas pas seulement sous la forme d’une occupation militaire. C’est bien là tout le jeu de la diplomatie. Mais, comme l’ont aussi prouvé les conflits israélo-palestinien, vietnamien, coréen… la diplomatie internationale est malade, incapable d’œuvrer pour une paix mondiale et de résister aux appétits nationalistes qui naissent de partout.

Désormais, plus personne n’écoute les Humanistes, les Pacifistes. À force d’élire pour diriger nos démocraties d’anciennes vedettes de cinéma, des hommes d’affaires au passé douteux, issus de la banque, d’ex militaires… la voie démocratique dévoile une faille considérable. Où sont passés les grands hommes, les grandes idées ; l’intelligence du cœur, le courage et la compassion ? On a progressivement substitué les êtres de raison et de culture par un escadron de « super-héros » dont l’efficacité à éradiquer le malheur de cette planète n’existe que dans un monde de fiction et est sans doute devenue la plus grande supercherie de ces deux derniers siècles. La gouvernance se résume à nouveau à l’idée de règne et les Présidents néo empereurs ne pensent plus qu’à jouir de leur statut et le proroger aussi longtemps que possible. On sait où mène cette politique sans vision, autre que personnelle; elle n’est pas nouvelle. Elle conduit à la violence, l’injustice et la destruction.

Si réellement la démocratie est « le moins pire des systèmes politiques », n’est-il pas temps de le rendre meilleur plutôt que de s’en servir pour justifier les pires exactions ? Jamais le microcosme et le macrocosme politiques, gouvernances étrangère et intérieure, n’ont autant été en phase. À force de clamer haut et fort : « J’ai le droit de faire ce que je veux, puisque nous sommes en démocratie », empathie et compassion disparaissent de nos sociétés pour laisser place à l’égoïsme et à la violence. Agressions et incivilités se multiplient, et la peur est palpable à l’échelle de la famille, du quartier, de la communauté, des pays.

 

Ce qui structure désormais les grandes démocraties, ce sont les réseaux sociaux, ce qui les anime, le divertissement.

Jamais autant de personnes n’ont eu si vite voix au chapitre sur tout et sur rien. Plus généralement sur rien, puisqu’il s’agit de s’exprimer sur des faits non digérés, non analysés. L’émotion et le sensationnel priment sur la réalité, l’apparence sur l’authentique. Ces réseaux ont acquis une puissance encore insoupçonnée. Ils recèlent une terrible force de désinformation (fakes), de haine, de manipulation et « d’influence ». Aujourd’hui, un Spinoza ou un Confucius ne vaudraient pas tripette s’ils ne consentaient à livrer leur intimité en pâture, ou mieux, à dévoiler une partie de leur anatomie sur les écrans, et ainsi entrer dans le club très envié des « influenceurs » gratifiés de milliers de Like et de millions de Followers. Ce n’est plus le savoir qui fait l’audience, mais l’excentricité qui forme illusion de liberté. Cette nouvelle réalité s’accompagne d’une gigantesque vague de « désenculturation » (pardon pour ce néologisme), un tsunami de crétinisme ; le retour au bon vieux système du « Pain et des jeux » prôné par ces autres grands démocrates qu’étaient les empereurs romains.

L’écrivain québécois Roger Fournier écrivait dans son Journal d’un jeune marié : << Quand on distrait le public, on l’aveugle. >>

 

Partout, des rêves d’empereurs, de demi-dieux. En Russie avec Poutine, en Chine avec Xi, au Brésil avec Bolsonaro, et tant d’autres Jupitériens en herbe à travers le monde.

Selon vous, que pensent-ils du droit ou du délit d’ingérence ?

Spinoza, justement, avait semble-t-il résolu la question, dans son Traité de l’autorité politique, en y affirmant que << Les hommes sont davantage conduits par le désir aveugle que par la raison. >>

 

À lire et à relire :

Traité politique   Baruch de Spinoza   Ed. Le Livre de Poche, collection Les classiques de la philosophie

Publié le 27/08/2021
"Greenwashing" : lorsque l’on connaît le prix de tout et la valeur de rien.

Cet aphorisme d’Oscar Wilde (« Aujourd’hui, les gens finissent par connaître le prix de tout et la valeur de rien. ») constitue un élément clé de la lecture du Chant des galahs. Elle est liée à la question environnementale qui constitue le cœur du livre ; plus particulièrement les dangers du Greenwashing.

Je suis heureux qu’elle ait suscité l’intérêt de plusieurs lecteurs, et aussi leurs questions, auxquelles je vais essayer de répondre ci-après.

 

Greenwashing. Le néologisme est intéressant : « Lavage vert ». Il désigne le blanchiment des profits que génèrent nombre d’entreprises et d’organisations grâce à une politique prétendument « verte ». Il est le prolongement direct et logique de l’installation, à l’échelle mondiale, des marchés de compensation carbone, publics puis privés.

 

Pour bien comprendre, il nous faut voyager jusqu’au Japon, plus précisément Kyoto, et remonter le temps jusqu’en 1997, date à laquelle est créé le protocole d’un marché des émissions carbone et de leur possible compensation.

La question environnementale est désormais prise au sérieux. Malgré le déni des climato-sceptiques, la menace du réchauffement climatique est une idée qui fait son chemin et représente déjà pour beaucoup une réalité. Selon les scientifiques, pour contenir celui-ci, il serait nécessaire de stopper toute déforestation, réduire de plus de la moitié nos émissions carbones, et « piéger » deux fois plus le CO² émis. Un « plan Marshall » dont aucun dirigeant n’aimerait prendre la responsabilité, de toute évidence.

L’industrie mondiale continue pourtant d’émettre de lourdes émissions carbones et se dit incapable d’y remédier sans risquer de remettre en cause son activité, brandissant les sempiternelles menaces du chômage et du retour à l’âge de pierre.

 

En 1997, une solution miracle est « sortie du chapeau » : pourquoi ne pas définir un prix de la tonne de carbone et taxer les entreprises qui polluent, en leur offrant la possibilité de financer des projets « verts » générant des « crédits carbone » (1 crédit-carbone = 1 tonne de CO² détruite) ? L’entreprise pourra ainsi « compenser » le coût carbone de ses productions en investissant ce montant en crédit carbone et dès lors poursuivre ses activités le plus légalement du monde.

 

L’idée est tellement bonne qu’on évalue aujourd’hui le marché annuel du carbone à plusieurs centaines de millions d’unités, avec une multiplication par quinze d’ici la fin de cette décennie !

Les entreprises polluantes se sont mises à acheter des plantations d’arbres dans le monde entier, croyant se créer ainsi une bonne conscience et surtout une meilleure image à l’égard du public. (En mars 2021, Total a par exemple communiqué sur son financement d’une forêt de 40 000 hectares (!) au Congo, afin de contribuer à ses efforts de compensation CO²).

 

Il ne fallait pourtant pas être grand sorcier pour comprendre que la démarche était dangereusement bancale et que la compensation pourrait bien n’être qu’une fausse bonne idée.

La priorité des entreprises (pétroliers, chimistes, laboratoires, automobile…) aurait dû être de financer de la Recherche en vue de réduire leurs propres émissions de CO². Mais d’évidence, l’investissement était plus risqué, plus complexe et moins rapide à leurs yeux. Alors, plutôt que de changer profondément les processus, banco pour la compensation carbone !

 

Tout aussi grave est la réalité que cachent ces « projets verts », souvent défendus par des ONG dont les dirigeants ressemblent plus à des financiers de haut vol qu’à des naturalistes ou des humanistes. (Certaines de ces ONGs se situent aux premiers rangs de la finance carbone et vantent leur combat contre le réchauffement climatique, alors que leurs réalisations relèvent du pur scandale écologique !)

 

Les projets de compensation carbone soulèvent en effet de graves questions.

Leur efficacité en tant que « piège-carbone » est-elle correctement évaluée ? Combien de tonnes de CO² une forêt nouvellement plantée détruira-t-elle en réalité ? Question essentielle, puisqu’elle fonde le montant de la compensation exigée des entreprises qui, elles, pendant ce temps, continuent de polluer très réellement.

Non seulement il faut plusieurs années avant que des arbres fraîchement plantés puissent fixer le carbone, mais surtout, quelle sera la durée de chaque plantation ?

Pour que la compensation soit valable, il faudrait que le CO² soit stocké par les arbres durant plusieurs siècles ! Or, au rythme des déboisements (liés aux nouvelles politiques d’urbanisation ou agricoles) et surtout des incendies… cela ressemble fort à un jeu de dupes !

En outre, il s’agit presque toujours de monocultures d’arbres, avec des espèces pas toujours très efficaces ou trop gourmandes en eau. Les écosystèmes sont détruits, la biodiversité est menacée, les intérêts des populations locales rarement pris en compte.

À titre d’exemple, la création des parcs naturels en Afrique au cours du 20è siècle a généré l’expulsion de leurs terres de plusieurs millions d’éleveurs et agriculteurs, presque toujours par la force.

Le respect du Droit à un consentement libre et éclairé des populations locales est souvent bafoué, et on ne compte plus les scandales à ce sujet en Afrique, en Amérique du Sud, en Indonésie et en Asie.

 

Lorsque des marchés privés de compensation voient le jour, et alors que le CO² est déjà devenu une monnaie, et la compensation une opération financière, le Greenwashing connait un fort regain d’intérêt.

De nouvelles places de marché sont créées, de nouveaux types de crédits-carbone sont définis et financés, avec l’aide d’experts techniques, de banquiers et, bien sûr, des clients pour les acheter. Une gestion privée qui s’autocontrôle, fixe les prix et les barêmes…

 

Ce que révèle l’enquête de Barbara (l’un des personnages du Chant des Galahs), c’est que de solides organisations (banques, ONG, et un très puissant lobby financé par les géants de la pétrochimie, des mines, de l’agro-alimentaire, de l’automobile...) coordonnent l’acquisition de terres sur toute la planète, plus seulement pour assurer des plantations d'arbres, mais aussi la protection d’écosystèmes sensibles, d’espèces menacées ou rares. Le principe de compensation reste le même. Des banques financent ces nouvelles niches écologiques, des milices armées assurent la protection des réserves, les populations locales sont expulsées ou leur mode de vie menacé. Et plus le « projet » financé est capable d’émouvoir le grand public, meilleur il est ! Quel bonheur de voir un pétrolier investir pour la survie de koalas ; d’apprendre que ce grand consortium de la chimie dépense une (infime) partie de ses bénéfices pour la protection des chimpanzés ou d’une espèce rare de baobabs ; de savoir que notre cher banquier s’intéresse aussi à la protection d’une zone littorale au sud du Sri Lanka !

Jamais les services de com des entreprises n’auront eu autant de facilités à défendre l’image de leur entreprise. Un ou deux labels écolos créés de toutes pièces, une terminologie adaptée, une charte graphique plus « verte » (que nature), de nouveaux emballages… et le tour est joué.

La RSE (Responsabilité sociale des entreprises) est « garantie », et les consommateurs piégés.

 

Des entreprises aux activités destructrices pour la planète refusent d’investir dans de nouvelles approches de production. Elles préfèrent « blanchir » leur image (en la verdissant) et nous faire prendre des vessies pour des lanternes (au risque de nous brûler, aurait ajouté un certain Pierre Dac) ! 

Publié le 18/08/2021
Rencontre à Epagny en octobre autour du Chant des Galahs

Avec cette crise sanitaire, on en deviendrait presque superstitieux.

Il est bien difficile en effet d'être certain de la venue de certains évènements. Je ne compte plus ceux auxquels il était prévu que je participe (rencontres, conférences, signatures...) et qui ont dû être annulés pour "cause Covid".

 

J’ai cependant reçu confirmation de l’invitation qui m’est faite de participer à une rencontre avec les lecteurs d’Epagny Metz-Tessy, dans cette belle Haute Savoie que j’aime tant depuis mon enfance. Celle-ci se déroulera le vendredi 8 octobre 2021, à 19h00 à la Bibliothèque La Lyaude.

 

 

Autour du Chant des galahs, les échanges porteront en particulier sur l’Australie, les voyages et la littérature.

 

La rencontre se poursuivra par deux journées de dédicaces et de tables rondes au Salon du livre d’Hermillon, en proche région voisine de Savoie, au cours duquel est décerné le Prix Rosine Perrier (le samedi soir) à l’un des 12 romans finalistes. Ce Prix récompense une œuvre de fiction française ou de langue francophone (romans, récits, nouvelles) inscrite dans un territoire, l’enracinement nourrissant le travail d’écriture.

Publié le 14/08/2021
Aborigènes d'Australie et politiques d'assimilation

Les Aborigènes d’Australie sont au cœur du roman que je viens d’achever (comme suite au Chant des galahs). Je continue de ce fait à suivre de très près l’actualité qui les concerne.

À travers de précédentes rubriques, j’ai clairement dénoncé les propos et les actes de Mr Morrison (Premier ministre australien), notamment en ce qui concerne sa politique sociale et environnementale. Aussi, lorsqu’il agit positivement à l’égard de la communauté aborigène de son pays, l’honnêteté commande de le mentionner.

 

La vie des autochtones australiens a été un enfer durant toute la période de colonisation, et reste aujourd’hui très difficile pour de nombreuses raisons. La loi blanche est très souvent antinomique avec la Loi aborigène (au sens de fondement civilisationnel), et génère injustice et incompréhension réciproque.

Pour tout ce qui concerne l’éducation, la santé, le niveau de vie, la justice... les Aborigènes (et habitants du détroit de Torres) ne bénéficient pas des mêmes conditions que celles des Blancs. L’actualité entretient cette réalité, mais le passé aussi, avec des cicatrices qui, malgré les décennies, ne s’effacent pas et continuent de faire souffrir une large partie de cette population. Un passé honteux au sein duquel les « politiques officielles d’assimilation » tiennent une place prépondérante. Des politiques qui ont chassé les Aborigènes de leurs terres, ont séparé les familles, ont permis les meurtres et les viols, ont généralisé la pratique infâme de l’enlèvement des enfants du sein de leurs familles, pour être placés dans des « institutions » religieuses ou des familles adoptives, et, en réalité, être exploités tels des esclaves.

Ce sont des milliers d’enfants qui ont subi ce sort, jusque dans les années 1970.

 

Le gouvernement australien, qui avait déjà reconnu ce passé honteux, a enfin décidé d’agir en faveur des familles concernées. Les enfants kidnappés, issus de cette génération volée (il est difficile de remonter jusqu’aux générations précédentes), recevront un peu moins de 50 000 euros à titre d’indemnité, ce qui représente environ 240 millions € à l’échelle du pays. Chaque victime percevra également un peu plus de 4000€ au titre d’aide pour la guérison, et pourra adresser un témoignage officiel au gouvernement en vue de recevoir des excuses par écrit de celui-ci.

 

Cela ne pourra suffire à réduire les profondes inégalités qui subsistent entre les communautés, mais c’est un pas indispensable et honorable que le gouvernement vient de franchir, ce qui mérite d’être salué.

Publié le 05/08/2021
Coup de chapeau à… Brigitte Bardot

Apporter son soutien à Brigitte Bardot c’est accepter le risque d’être la risée d’un certain nombre d’imbéciles ! Et alors ? J’ai non seulement un profond respect pour la personne qu’elle est et telle qu’elle se révèle à travers ses engagements bien réels, mais aussi une très grande admiration.

 

Compter Brigitte Bardot au rang des grandes féministes de notre société en choque certain(e)s ? Et alors ? Car tout de même : quelle femme ! Une femme qui a un combat et y investit chaque minute de sa vie, et qui surtout a su ne pas se laisser enfermer dans l’image caricaturale que les hommes, son métier, la société voulaient créer d’elle. BB est tout sauf une bimbo écervelée dont la seule destinée serait de satisfaire les fantasmes des hommes.

 

Sa destinée, elle a le courage de la prendre en mains alors qu’elle n’a que 28 ans et est devenue une icône du cinéma dans le monde entier. Elle a acquis le succès, l’argent, la célébrité. Et pourtant… Plutôt que sa carrière, elle choisit de mettre son succès, son argent et sa célébrité au service de la cause qui lui tient à cœur : lutter contre la souffrance animale. Brigitte Bardot décide, avec une volonté et un courage incroyables (en particulier dans le contexte d’une société aussi machiste) de quitter le cinéma et de se faire l’ambassadrice des animaux. Être, comme elle le dit si bien, la voix des « sans-voix ».

 

Ce qu’elle réussit à accomplir pour mener à bien sa mission, combien d’autres oseraient et réussiraient à le faire ?

Partout, au Canada, en France et ailleurs, il y a eu des imbéciles pour la mépriser, la railler et aussi l’insulter. Il est indubitable que sa vie même a été en danger. Mais elle n’a jamais renoncé et a continué de « foncer » malgré les piques les plus cruelles. Pas étonnant qu’elle se batte si bien contre la tauromachie !

Heureusement, il y a aussi tous ceux qui ont cru en elle, partagé ses idées et décidé de la soutenir.

Aujourd’hui, la Fondation Brigitte Bardot compte pas moins de 128 salariés, 44 bénévoles actifs et 400 délégués et enquêteurs. Elle est administrée par un conseil d’administration qui compte trois ministères de tutelle (Intérieur, Environnement, Agriculture), garants de la bonne affectation des fonds. En 2019, son service juridique a répondu à plus de 35 000 demandes et plus de 3 300 enquêtes dont 71 % pour mauvais traitements ont été diligentées.

Il suffit de consulter l’Info-Journal de la Fondation, ou son site, pour prendre la mesure du travail accompli, et ce dans le monde entier.

 

En voici un rapide exemple pour tous ceux qui considèrent le cheval autrement qu’un énorme steack monté sur pattes ou un moyen de rapporter beaucoup d’argent.

Dans le N°117 de l’Info-Journal de la Fondation, on apprend que des milliers de chevaux vivants sont envoyés chaque année par avion au Japon… pour y être consommés !

La France tient même la seconde place dans ce commerce, après le Canada.

Que des chevaux soient abattus pour leur viande est certes déjà très discutable. Mais qu’ils soient envoyés vivants par avion… ! 12 h de transport pour des animaux placés par quatre dans des cages en bois, sans séparateur pour éviter qu’ils se blessent, malgré les turbulences en vol, le stress de l’atterrissage et du décollage, le bruit, les changements de température, etc. Ceux qui connaissent un peu les chevaux savent pourtant à quel point cet imposant animal est en réalité très sensible au moindre stress.

Et l’article de nous apprendre que cela n’est rien au regard du nombre de bovins et ovins exportés vivants par la France vers le Proche et le Moyen-Orient chaque année.

Le (la ?) journaliste conclut son papier avec ces mots :

<< La Fondation Brigitte Bardot milite pour la fin de l’abattage des chevaux et leur consommation, elle s’oppose formellement à l’exportation des bovins, ovins et autres animaux vivants, et demande aux autorités françaises et européennes que le commerce d’animaux vivants soit au plus vite remplacé par le transport des viandes et carcasses congelées. >>

 

Un peu plus loin dans la revue, on apprend (avec soulagement) que d’autres pays en Europe progressent plus vite que la France en matière de respect du bien-être animal. Ainsi l’Angleterre qui s’est engagée à stopper la plupart (cette approximation est regrettable) des exportations d’animaux vivants, et à interdire l’importation de trophées de chasse. Et aussi l’Italie qui vient d’interdire l’importation, la détention et le commerce d’animaux vivants sauvages et exotiques (la loi sera mise en œuvre dès 2022).

Chaque fois, la Fondation BB relaie l’information auprès du gouvernement français et des instances européennes en demandant que ces progrès soient également appliqués en France.

 

Mais le mieux, est encore de visiter le site de la Fondation :

https://www.fondationbrigittebardot.fr/

 

À lire et à relire :

Un cri dans le silence   Brigitte Bardot   Ed. du Rocher 2003

Larmes de combat   Brigitte Bardot   Ed. Plon 2018

Publié le 02/08/2021
Le chant des galahs bien visible en librairie

<< Les « Coups de cœur » arrivent en escadrille >> (aurait dit Audiard), pour mon plus grand bonheur…

Et celui de la belle librairie lyonnaise   Raconte-moi la terre  spécialisée en littérature de voyage (et, comme son nom l’indique, passionnée d’environnement), me touche tout particulièrement, puisque j’avais eu le plaisir, il y a quelques années, d’être invité par l’équipe (de passionné(e)s) pour une journée de dédicaces sur un précédent ouvrage. Merci à elle !

 

Publié le 30/07/2021
À livre ouvert – Le Rat conteur

Un grand merci à la sympathique équipe de la librairie  À livre ouvert – Le Rat conteur (sise à Woluvé St Lambert, en Belgique) pour son Coup de cœur à la lecture du Chant des galahs !

 

Publié le 27/07/2021

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