Des chiffres... et des idées

Bon, bien sûr, il faut pouvoir lire en anglais. Il faut aussi aimer les chiffres et les graphiques. Et, surtout, mieux vaut avoir un moral d’acier ! Pourtant, je vous l’assure, la lecture du tout récent World Inequality Report 2022 est essentielle pour obtenir une photographie juste, précise, détaillée, explicite… de notre humanité.

 

Ce document, réalisé par un groupe d’une centaine d’économistes internationaux dans le cadre du laboratoire sur les inégalités mondiales créé par l’École d’économie de Paris, et animé par Thomas Piketty depuis 2013, établit une cartographie mondiale des inégalités et fournit à ce sujet une mine d’informations.

En plus de son niveau de détail très élevé, les principaux atouts de ce rapport sont, me semble-t-il, de ne pas se limiter à la seule comparaison des revenus et richesses, mais d’ajouter des critères d’inégalités comme l’empreinte carbone, la part des revenus des femmes, la comparaison entre continents… En outre, il ne s’agit pas d’une image statique, mais au contraire évolutive dans le temps : montrant ainsi comment évoluent les diverses inégalités à travers le temps et l'espace.

 

Je vous l’accorde, nous savions déjà que certains sont plus riches que d’autres, ont des salaires très différents, que les femmes sont moins bien considérées sur le plan professionnel et que l’Américain moyen pollue plus qu’un fermier à Madagascar (même si c’est ce dernier qui paye le prix de cette pollution). Cette certitude explique les esprits « blasés », prompts à conclure : « Et puis quoi, qu’est-ce qu’on peut y faire ? C’est comme ça, un point c’est tout. Que le plus fort gagne ! ».

Mais le World Inequality Report 2022 ne tombe justement pas dans le piège de vouloir apporter des solutions et convaincre à tout prix qu’il faut lutter contre les inégalités. Il s’avère juste un outil précieux pour ceux que ce sujet intéresse et cherchent à comprendre nos structures sociales en s’appuyant sur un « état des lieux » rigoureux et quasi-exhaustif.

 

D’ailleurs, certaines « images d’Épinal » en prennent pour leur grade.

Ainsi, la Chine de Xi Jinping, qui se revendique des principes « égalitaires » et « humanistes » du communisme, et où, pourtant, l’inégalité entre hommes et femmes ne cesse de s’accroître depuis 30 ans, tandis que l’empreinte carbone des riches s’alourdit d’année en année, sans parler des richesses, avec une répartition de la richesse nationale qui place l’Empire du Milieu en tête des pays d’Asie de l’Est : 10% des Chinois les plus riches possèdent 69% de la richesse nationale (contre 64 % en Inde, 60 % en Indonésie et 58 % au Japon).

 

Le constat est sans appel. Libéraux et communistes dans le même combat. Globalement, la moitié de la population mondiale la plus pauvre, ne possède… rien ! 2% du total du « gâteau ». Tandis que les 10% les plus riches en détiennent 76%.

 

Alors, qui porte la responsabilité de consommer l’intégralité des ressources de la planète en seulement 7 mois, là où il lui en faut 12 pour se régénérer ? Quels sont ceux dont le mode de vie engendre et accélère le réchauffement climatique ainsi que les dérèglements qui en découlent ? Quelles en sont les victimes ?

Les chiffres, les faits analysés dans ce remarquable travail collectif ne sont pas commentés pour lancer des accusations ni condamner. Mais ils suscitent clairement des questions. Peut-être aussi l’envie, chez une majorité de lecteurs, qu’un prochain rapport montre des chiffres très différents.

Avec le risque, d’ici là, que de profonds bouleversements aient modifié la donne.

 

À lire et à relire :

World Inequality Report 2022     Consultation libre et gratuite sur : https://wir2022.wid.world

Publié le 09/01/2022
La Tasmanie (cf. rubrique un peu plus bas), et maintenant le Nunavut !

Le Nunavut, territoire le plus au Nord du Canada et qui offre aux Inuit un gouvernement autonome, semble à nos yeux, à l’instar de la Tasmanie, une de ces terres du « bout du monde ».

 

Pourtant, lui non plus n’échappe pas aux conséquences de l’épidémie de Covid qui, en outre, crée une double problématique. En effet, si les cas de Covid y ont explosé, entraînant un confinement complet du territoire depuis le 24 décembre (triste réveillon), ils risquent hélas aussi de décupler les effets d’une autre terrible maladie qui sévit dans ces régions : la tuberculose !

 

À l’instar des hôpitaux en Europe, obligés de déprogrammer des soins pourtant essentiels afin de traiter les patients souffrant de Covid (certains témoignages sont accablants et il semble que les conséquences sont pour l’instant le plus souvent passées sous silence), au Nunavut, une bonne partie des fonds initialement alloués à combattre la tuberculose a été détournée pour lutter contre la Covid ! Plus grave encore, les conditions de confinement ! Les habitats sont en général très petits au regard du nombre d’occupants, et le climat local n’en facilite pas l’aération. Résultat, la tuberculose pourrait bien repartir de plus belle !

 

Dans le même temps, alors que la température en Californie est tombée sous les 30° (avec 70 cm de neige), l’Alaska bat tous les records de chaleur avec 20°… en plein mois de décembre !

Étranges inversions.

 

Depuis l’écriture de La dernière course, Mush !, et Emily et le chasseur d’étoiles, dédiés à ces régions (Alaska, Canada…) et malgré mes escapades « australiennes », je suis resté très attaché au devenir de ce bout du monde, et je souhaite sincèrement que cette Nouvelle Année 2022 y sera plus clémente et heureuse pour ses habitants (à 2 et 4 pattes). 

Publié le 04/01/2022
BONNE ANNEE !!!

 

Publié le 04/01/2022
Zut, de tristes nouvelles de Tasmanie.

Noël est l’occasion de multiplier les messages avec tous les amis (avec toute la prudence requise du fait de la covid, et donc surtout par téléphone, courriers, courriels…), y compris ceux qui vivent à l’autre bout de la planète.

 

C’est ainsi que je viens d’apprendre que la Tasmanie que j’aime tant, épargnée par l’épidémie jusque récemment (0 cas avant le 15 décembre) est à son tour impactée ! Le gouvernement a décidé, malgré la situation internationale, de rouvrir les portes de l’État à toutes les autres régions du pays. Résultat : 15 jours après, plus de 100 cas sont déjà enregistrés !

 

Bien sûr, nous sommes encore très très loin des >100 000 cas par jour de la France, et c’est tant mieux. Mais cela a entraîné le port du masque obligatoire, les gestes barrière et toutes les angoisses qui vont de pair, que nous connaissons bien, pour une population qui avait la chance de pouvoir être tranquille et qui risque, à son tour, de connaître un « avant » et un « après » covid.

Les prochaines élections seront chaudes aussi en Tasmanie !  

Publié le 26/12/2021
Une nouvelle enquête (australienne) d'Archibald Anderson

Je suis heureux de vous annoncer la parution très prochaine de :

 

<< COUNTRY >>

Terre australienne

 

…une nouvelle enquête d’Archibald Anderson, qui fait suite au Chant des galahs, paru en 2020 et réédité en Poche en 2021.

 

Voici le pitch éditeur de ce nouveau récit ainsi que la couverture retenue :

 

 

<< Après le succès du Chant des galahs, (finaliste de trois Prix, Coup de cœur France Inter), Country est le second opus « australien » de Pascal Vatinel, et son onzième roman.

On y retrouve Archibald Anderson, jeune officier-détective de la brigade des personnes disparues de Perth (Australie Occidentale). Vu la tournure dramatique prise par sa toute première enquête dans la région sauvage des Goldfields, son supérieur, le Superintendant Higgins, préfère ne pas renvoyer trop tôt sa jeune recrue dans ce secteur. Mais ni Higgins ni Archie ne pouvaient se douter qu’une banale recherche de mari disparu dans les Collines, banlieue élégante de Perth, remettrait en cause cette sage décision.

Archie y fait la connaissance de Mary Potter, l’épouse du disparu. Une fervente protectrice d’un couple de quendas, petits marsupiaux dont l’espèce est menacée et qui, selon le détective, ressemblent surtout à des gros rats. Archie résout son enquête avec brio. Il se retrouve toutefois avec le couple de quendas sur les bras. Il choisit de les confier à Tasha, la charmante directrice d’un hôpital vétérinaire proche. Celle-ci accepte d’en assurer la garde, mais, en échange, sollicite à son tour l’aide du détective. Elle lui demande d’enquêter sur le meurtre récent d’une de ses amies, vétérinaire elle aussi, et de son jeune guide aborigène, retrouvés sauvagement assassinés près de Menzies, au nord de la région des Goldfields.

Deux autres personnes sont signalées disparues par la police locale. Quant au jeune guide aborigène assassiné, Archie apprend qu’il s’agit d’un cousin de Donald, le pisteur tjuntjuntjara au talent quasi-surnaturel à qui il a déjà eu affaire, un an plus tôt. Donald a annoncé sa venue à Menzies, résolu à déterminer les circonstances de la mort de son cousin. Autant d’éléments qui décident Archie Anderson à prendre le chemin des Goldfields, au risque d’y revivre ses insupportables cauchemars.

Archibald sait pouvoir compter sur le sergent-chef Jim MacBoyd, en charge de la police de tout le secteur et avec lequel il s’était lié d’amitié. D’autres lui apporteront son aide à Menzies. À commencer par un ancien collègue, Gary Paterson, désormais à la retraite avec son adorable femme Elizabeth. Paterson connaît intimement la ville et son histoire, et n’est que trop content de reprendre du service auprès du jeune officier. Donald sera bien sûr un allié précieux, lui-même aidé par la communauté tjuntjuntjara et en particulier l’un de ses aînés, Clifton Jacko, un « initié » que tous respectent.

Higgins n’accorde toutefois que sept jours à Anderson pour mener son enquête ; pas un de plus. C’est peu lorsqu’il s’agit de retrouver deux suspects en fuite et élucider, entre autres énigmes : l’origine du mal inexplicable qui frappe les moutons d’une grosse ferme locale ; la raison pour laquelle Ava Maguire, l’amie de Tasha a été assassinée au moment précis où elle pensait éclaircir ce mystère ; les véritables desseins de ce riche homme d’affaires britannique venu récemment s’installer dans la région, et ce qui relie celui-ci à Jimmy Tucker, un Aborigène assassiné en 1895 ; l’étrange malédiction qui pèse sur la terre cédée par la ville à l’Anglais ; et, bien sûr, les raisons qui ont poussé un individu à massacrer avec sauvagerie Sam Collard, ce jeune Tjuntjuntjara plus attiré par les promesses de la riche société blanche que par les traditions de son peuple, et dont « l’affection » pour Ava Maguire était connue de tous.

Pour Archie Anderson, le programme ne saurait être plus engageant : survivre sept jours au cœur d’une région peuplée de dromadaires sauvages, de lézards géants, de fourmis et d’araignées au venin mortel, ainsi que de villes fantômes qu’enveloppe une chaleur étouffante… loin, très loin des belles et confortables Collines où toute cette affaire a commencé.

Sept jours, pas un de plus ! >>

 

L’ouvrage est d’ores et déjà disponible en version numérique (Amazon et plateformes partenaires) au prix de 3.99€ et en version imprimable à la commande à 13.99€.

 

Joyeuses fêtes de Noël à tous !

Publié le 18/12/2021
Au loin, une montagne...

Au cœur de l’Institut Confucius de Rennes la 1ère édition du Salon du livre Franco-Chinois a été une réussite !

Bravo à Blaise Thierrée (dir. de l’Institut) et son équipe pour leur chaleureux accueil et une organisation favorisant de belles rencontres.

 

J’ai été heureux d’y retrouver mon « vieux » collègue (il est plus jeune que moi) Michel Imbert, auteur lui aussi de polars chinois, et de faire la connaissance, entre autres, de Geneviève Clastres, une journaliste engagée pour l’environnement et le tourisme durable (voyageons-autrement.com), Bernard Allanic, Maître de conférences à Rennes en langue et écriture chinoise et avec lequel j’ai eu des échanges passionnants, sans oublier une pléiade d’auteurs et illustrateurs chinois tous très sympathiques.

J’ai en particulier apprécié la présence du grand dessinateur Nie Chongrui et de son épouse Nathalie, dont la gentillesse m’a beaucoup touché. J’ai eu la chance de recevoir des mains de Nie son splendide ouvrage dessiné, autobiographique : « Au loin, une montagne… », qu’il m’a dédicacé.

Je viens d’en terminer la lecture, ô combien émouvante, qui nous offre un témoignage sincère et poignant de la jeunesse de Nie, dans les années 1960, dans une Chine où la Révolution culturelle bat son plein. Chaque image de ce livre est une œuvre d’art, et le propos un récit d’humanité.

 

À lire et à relire :

Au loin, une montagne…    Nie Chongrui   Éditions Steinkis

Publié le 11/12/2021
Chère Nouvelle-Zélande...

Parmi les très rares pays sur cette planète où la nature est encore un peu préservée et où, par conséquent, l’air, l’eau, la terre sont les plus purs au monde, figurent la Tasmanie (je peux en témoigner) et… la Nouvelle-Zélande !

 

La nouvelle loi que cette île du bout du monde envisage de voter pourrait bien contribuer à préserver cette extraordinaire pureté pour les décennies à venir, même si elle peut paraître anodine pour ses aspects écologiques et davantage concerner le secteur de la santé.

Elle concerne l’interdiction progressive de fumer, et ce d’une façon totalement originale et particulièrement intelligente.

 

Là-bas, la promotion du tabac est déjà interdite dans les milieux sportifs, et fumer est prohibé dans les bars ainsi qu’à tous les mineurs (-18 ans). Malgré cela, cette mauvaise habitude reste à l’origine de 25% des cancers sur l’île, et contribue en bonne place à la mortalité globale.

Conscient des arguments présentés par les fumeurs adultes : « atteinte aux libertés individuelles », « difficultés (réelles) de rompre avec une addiction », mais aussi des efforts constants et sans cesse innovants de l’industrie du tabac pour augmenter le nombre de ses consommateurs, le projet envisagé par la N Z pourrait intéresser nombre de pays incapables de trouver une approche efficace pour lutter contre ce fléau sans heurter les « sensibilités électorales » et tenant compte de la réalité des addictions liées au tabac fumé.

 

L’idée est qu’à compter de 2027, la limite d’âge pour l’interdiction d’acheter du tabac augmente d’un an chaque année ! C’est tout simple, discret, et pourtant redoutablement efficace !

Ainsi, ceux qui auront + de 18 ans à cette date, pourront continuer de fumer et ne seront pas impactés par cette loi. En revanche, les mineurs qui ne pouvaient en acheter, ne le pourront pas non plus à leur 19ème anniversaire, ni à leur 20ème, 21ème, etc. La limite de l’interdiction « vieillissant » en même temps qu’eux. Une façon de ne jamais les inciter à entrer dans cette dépendance. Les ventes de tabac, elles, chuteront d’année en année, en même temps que la frange de consommateurs autorisés diminuera, progressivement, mais sûrement !

 

Cette idée remarquable contribuera, comme je le disais en introduction, aux objectifs de bien-être sanitaire pour la population, mais également à une encore moindre pollution de l’environnement. Car, rappelons-le, fumer ne rend pas seulement l’air irrespirable (pour les autres), mais génère une importante pollution des sols et des eaux du fait des nombreuses substances toxiques que contiennent les mégots, jetés en général n’importe où (toujours au nom du principe des « libertés individuelles »).

Cette conséquence positive peut paraître négligeable à l’échelle de la N Z, qui ne compte que 5,1 millions d’habitants dont environ 600 000 fumeurs.

Mais dans le cas de villes comme Paris, les proportions deviennent tout autres.

Dix millions de mégots sont jetés chaque jour dans les rues de la capitale ! Représentant 350 tonnes de déchets toxiques chaque année. Une sacrée épine dans le pied des trésoriers de la collectivité, comme dans celui des professionnels de santé et des écologistes.

 

Il est en tout cas intéressant d’observer qu’un « tout petit » pays comme la Nouvelle Zélande réfléchisse à des solutions innovantes que de « grands » pays comme la France, pourtant beaucoup plus concernés, n’envisagent même pas. 

Publié le 10/12/2021
Vous avez dit... éthique ?

Alors que dans toute l’histoire de l’humanité, la diffusion d’informations n’a jamais été aussi conséquente qu’au cours de ces dernières décennies – certains n’hésitent pas à la comparer à une véritable « bombe », tant le volume de données mises à disposition a explosé – force est d’observer que la pratique du mensonge et de la dissimulation en semble d’autant renforcée. Est-ce si paradoxal ?

 

Il apparaît, dans le cadre de cette observation, que l'intégralité des composants sociétaux soient impactés. La manifestation de ce phénomène se traduit en effet :

- au plan des individus, avec : le harcèlement contre les personnes (sous toutes ses formes), ou les multiples techniques de détournements, malversations, piratages… qui se développent.

- au plan des organisations financières (entreprises…) ou politiques (partis…) : par les tentatives d’extorsion de fonds à petite ou grande échelle (et d’enrichissement personnel), de manipulations de masse par la propagande ou la communication institutionnelle (type Greenwashing), etc.

Et c’est précisément parce que toutes les strates de la société, tous les groupes sociaux sont concernés, devenant eux-mêmes tour à tour manipulateurs ou victimes, qu’il ne peut être ici question de « théorie du complot ».

 

Trois explications se présentent d’emblée à nous (d’autres peuvent les compléter) :

 

- la multiplication des supports de diffusion qu’offrent les nouvelles technologies. À commencer par les fameux « Réseaux sociaux », leur rapidité sans cesse croissante, et leur accès facilité pour toute la population (à l’exception des « aînés », jugés réfractaires aux IT et à leurs applications, et qui, de toute façon, ont appris avec le temps qu’il était souvent préférable de se taire et aussi de ne rien voir ni entendre :)

 

- le partage quasi instantané de ces informations, quels que soient les faits concernés et les lieux où ils se déroulent. Une course de vitesse qui n’autorise plus la réflexion, la prise de recul, la « digestion » et l’analyse des données, avant de les répercuter. Circonstance très aggravante, puisque la plupart du temps on ne sait même pas quelle part des prédicats énoncés relève d’une factualité avérée.

 

- le volume colossal de données auquel chacun de nous peut ainsi avoir accès, qui, à son tour, rend difficile, sinon impossible, le moyen de séparer le bon grain de l’ivraie (fait ou fake ; sources rarement citées ; données vérifiées ou pas ; officielles ou officieuses, etc.) et, surtout, finit par nous noyer et nous contraint à une organisation et une rigueur sans failles pour ne pas être étouffés par ces innombrables informations, pris dans les pièges manipulatoires, piratés, et/ou atteints dans notre santé mentale (névroses, angoisses, addictions, et en particulier le cas des publics fragiles face à des thèmes omniprésents : violence, appels à la haine, pornographie, consommation, « influence », etc).

 

Autant d’éléments qui posent la question des limites de l’esprit humain, ses capacités d’absorption des données et de leur analyse, sa résistance aux stimuli et stress générés, sa facilité à faire la part du réel et du virtuel.

De nombreux spécialistes tirent le signal d’alarme depuis déjà plusieurs années, tandis que d’autres plaident pour un cerveau aux ressources infinies et le fait que si la Nature n’a pas « suffisamment bien fait les choses », les nouvelles technologies (y compris les implants neuronaux que défendent de grands financiers comme Musk ou Gates) sont là pour y pourvoir.

 

Deux positions radicalement opposées, face auxquelles nous devrions au moins garder à l’esprit que « se forger un avis » est un acte d’une nature très différente et beaucoup plus complexe que de simplement « avoir un avis ».

Et pour ceux qui restent circonspects sur la relation que l’humain entretient avec la science et, surtout de l’usage qu’il en fait, je repense à cette petite phrase d’Ignace de Loyola :

 "Ce n'est pas l'abondance de la science qui rassasie l'âme et la satisfait : c'est le sentiment et le goût intérieur des vérités qu'elle médite".

 

Mais la raison pour laquelle je m’interroge encore aujourd’hui à ce sujet, c’est précisément à cause d’une information récente concernant nos amis anglais et de leur passion pour les affaires liées à la Couronne. De l’information « people » comme on l’aime, et pas seulement outre-manche.

 

La concurrence, devenue semble-t-il rivalité, entre les deux couples formés par William et Kate d’un côté, et Harry et Meghan de l’autre, continue de faire les choux gras des medias britanniques. Et, l’écologie étant « à la mode », surtout en ces temps post Cop 26 de Glasgow (que toute le monde s’empressera pourtant d’oublier) on nous apprend que la prestation de William lors de la remise annuelle du fameux Earthshot Prize (dont David Attenborough est, entre autres, à l’origine, et qui est remis chaque année à cinq particuliers, organisations ou pays ayant témoigné des meilleures initiatives environnementales) a été remarquée et appréciée.

Qu’à cela ne tienne, Harry et Meghan, dont le mode de vie atteste d’une grande conscience écologique (déplacements en convois de lourds SUV ou en jets privés…) ont aussitôt orchestré une campagne médiatique, outre-Atlantique, informant de leur choix de placer une partie de leurs ressources financières dans un Fonds d’investissement, tout dédié au bien-être de la planète, et portant le beau nom… d’ Ethic.

 

Manque de chance pour les deux exilés, le Fonds en question, à l’instar de nombreux autres ou de célèbres Fondations, est passé maître dans les techniques de Greenwashing (Cf. billet du 18/08 consacré à ce sujet, dans cette même rubrique) et propose, à côté de quelques investissements dits « verts », un large choix qui s’étend de l’industrie du pétrole et de l’automobile jusqu’au secteur militaire (missiles) en passant par des sociétés réputées pour leur sens profond de… l’éthique, telles que celles appartenant au magnat Ruppert Murdoch.

 

Une boulette… royale ! Presque inimaginable lorsque l’on pense aux moyens d’informations dont dispose le couple Sussex et aux équipes qui le chaperonnent. Mais qui témoigne surtout comme il est difficile aujourd’hui de séparer le bon grain de l’ivraie et de ne pas être piégés, eux comme nous, par les informations tronquées ou fausses dont nous pouvons être victimes, quels que soient notre âge et notre statut social.

 

Plus sérieusement, et sans cette fois vouloir réfuter l’intérêt du développement technologique mais simplement de l’usage qui en est parfois fait, on découvre comme les plus acharnés à nous promettre un monde meilleur à coups de 5G, de 8K, de développement satellitaire et, tout récemment, de réseaux de type Metavers (Facebook), se gardent bien de ne jamais évoquer la colossale pollution que l’emploi de leurs technologies engendre.

 

Pour s’en convaincre, il suffit de lire le remarquable ouvrage de Guillaume Pitron sur l’Enfer Numérique (titre du livre). Son enquête sur le sujet, très approfondie et fort documentée, démontre qu’au-delà du monde mi réel, mi virtuel, que nous promettent les GAFAM, de concert avec les sociétés et organisations pilotées par ces hommes de grand pouvoir que sont devenus des milliardaires comme Musk, Bezos ou Gates, il existe un « inframonde » aux dimensions gigantesques, fait d’acier et de béton, constitué d’immenses datacenters, d’usines de productions d’énergie ; une infrastructure entièrement dédiée à toujours stocker davantage de données, à les analyser plus vite, les transmettre plus vite, consommant tellement d’énergie qu’il lui en faut encore plus pour « refroidir » ses unités, comme dans un cycle sans fin. Et tout cela, bien souvent, pour envoyer un simple « Like » !

L’impact sur la planète est considérable. G Pitron l’affirme : « La pollution digitale met la transition écologique en péril et sera l’un des grands défis des trente prochaines années. »

 

Mais cette information n’apparaîtra jamais sur la notice du smartphone que l’on aime changer chaque année (après que l’on nous ait cette fois expliqué à quel point le précédent était devenu obsolète) ni du téléviseur géant que l’on ne changera lui « que » tous les deux ans.

Les sociétés du secteur IT continuent au contraire d’investir lourdement dans une communication institutionnelle qui promeut le « vert » et le respect de la planète, réussissant ainsi à échapper au débat public en tronquant la réalité. Se pourrait-il qu’elles jugent les consommateurs, leurs clients, incapables de séparer le bon grain de l’ivraie ?

 

De toute façon, dans le cas où l’alerte lancée par Guillaume Pitron et d’autres devait se confirmer en tous points, aucun souci : il y a un plan B ! Bezos et Musk y travaillent : ce ne sont pas les planètes qui manquent au sein de l’univers !

 

À lire et à relire :

L’enfer du Numérique    Guillaume Pitron   Éditions LLL

Exercices spirituels    Ignace de Loyola  (1548)    desclée de brouwer éd.

Publié le 25/11/2021

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